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 La Saint-Jean (#7)

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AuteurMessage
Jonas Ångström
Oblivius
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La Saint-Jean (#7) Vide
MessageSujet: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeDim 21 Juin 2009 - 19:30

La Saint-Jean (#7) Saintj12

De nombreuses rumeurs parcouraient la foule en panique près de l’Eglise de Zetting, mais celle qui semblait avoir le plus de succès disait, globalement, que les fantômes des trois sorcières brûlées vives par les inquisiteurs étaient revenus hanter les vivants, et qu’ils avaient la ferme intention de mettre à feu et à sang toute la ville dans leur folie vengeresse… si ce n’était l’aide inespérée de ce groupe de vaillants exorcistes, qui avaient eu le courage de prendre les choses en main. Il y avait d’autres rumeurs, mais celle-ci était fort certainement la plus répandue, et ce n’était pas vraiment un coup du hasard. L’homme qui observait la foule depuis le clocher de l’Eglise, le sourire aux lèvres, n’y était pas pour rien, et en y repensant, il se dit que ça avait été un sacré boulot, quand même.

Tout avait commencé après le repas de bienvenue, quelques mois plus tôt. Enfin, de bienvenue, il n’en portait que le nom, parce que ce n’était pas vraiment le cas. Entre les Inquisiteurs qui voyaient d’un mauvais œil le manque de foi que leur accordait la papauté et les nobles qui avaient d’autres chats à fouetter avec leurs propres intrigues personnelles pour avoir à se préoccuper d’une bande d’intrus, l’accueil avait été relativement froid. Jonas avait envisagé cette possibilité, mais fut surpris de voir jusqu’à quel point toute la population de Forbach, ou presque, s’avérait incrédule, ou tout du moins particulièrement méfiante, et ce, du dernier des paysans jusqu’à la Comtesse. C’était troublant. Surtout qu’ils semblaient croire dur comme fer à l’existence de puissantes sorcières, et il semblait même qu’elles se faisaient quelque peu la guerre entre elles.

Peu importait les sorcières, seuls comptaient les fantômes, et là encore, les choses étaient assez troublantes. Ils n’avaient jamais vu une croyance si largement répandue auprès de toutes les couches d’une population en la présence de ceux-ci, et chacun avait sa petite histoire personnelle, qui ne ressemblait pas à celle de son voisin. C’était un véritable casse-tête, et beaucoup s’y seraient arrêtés. Jonas lui, ne prit cela que comme un défi, voire une occasion de montrer ce dont il avait toujours été capable.

Après quelques lettres, un certain nombre d’exorcistes arrivèrent en ville avec du matériel, gardé secret évidemment. D’autres se cachèrent ici ou là aux abords de la ville, et quelques-uns tentèrent de s’intégrer à la population, déguisés en voyageurs fourbus ou en marchants itinérants. Ceux que Jonas voulait toucher, c’était les plus humbles, les plus pauvres, les plus crédules : la populace. Il fallait trouver un lieu, une date et se mettre dans la poche une parties des ecclésiastiques du coin – sans rien leur dire de la vérité bien sûr. Oh, évidemment, Jonas était bien conseillé, mais n’est-ce pas la marque d’un grand Homme que de savoir bien s’entourer ?

Le « spectacle » aurait lieu pendant la fête de la Saint-Jean, dans et autour de l’Eglise de Zetting. Les avantages étaient nombreux et effaçaient toutes traces possibles de désagréments. L’office avait lieu pendant la nuit, il ferait sans doute un temps lourd, et tout le monde ou presque serait réuni au même endroit au même moment. Que demander de plus ? Du temps ? Ils en avaient. De la main d’œuvre pour tout préparer ? Ils en avaient. Des idées ? Ils en avaient. Plein.

Oui, Jonas, perché sur le clocher de l’Eglise se disait qu’il avait bien travaillé. Il arrivait à repérer, ici ou là, les hommes qu’il avait posté à des endroits stratégiques pour que les gens ne se ‘‘méprennent’’ pas sur ce qu’il se passait. Pour que tout le monde puisse savoir que les exorcistes étaient les héros de Forbach. Tandis qu’il descendait pour rejoindre ses hommes et leur dire que tout allait pour le mieux, il se dit qu’il faudrait qu’ils cachent une bonne partie de leur bazar au plus vite dès qu’ils en auraient fini.

De l’intérieur, on pouvait observer un groupe d’artificiers s’occuper de l’éclairage, des hommes avec des porte-voix s’occuper de l’ambiance sonore, un groupe en train de chanter un étrange cantique aux sonorités guerrières censé illustré la lutte des exorcistes, et quelques autres était occupés à l’ingénieux mécanisme qui faisait trembler les portes toutes en empêchant à quiconque à l’extérieur leur ouverture. C’était pas mal, mais de l’extérieure, c’était mieux.

Au dehors, les cris des fantômes se répercutaient dans les rues, mélangés aux cris des fuyards, mais toujours, les chants des exorcistes semblaient y répondre. D’étranges lumières visibles à travers les vitraux venaient frapper ceux qui n’avaient pas déjà fui loin de l’Eglise ou qui étaient restés tétanisés sur place, ou bien encore qui étaient blessés et ne pouvaient tout simplement pas fuir. Parce que ce n’était pas que son et lumière, loin de là.

Les exorcistes avaient tout préparés, et quelques instants après que le feu de joie ait été allumé… il explosa, littéralement, envoyant quelques feux d’artifices dans toutes les directions. Des hommes, habilement placés commencèrent, entre autre depuis le cimetière, à mettre en place l’ambiance sonore, mais ils quittèrent les lieux au plus vite, pour laisser le champ libre à la suite du spectacle : les caveaux explosifs. Ils avaient repérés quelques tombeaux de moindre importance, s’étaient arrangées pour retourner quelques tombes discrètement, et Jonas avait même trouvé le moyen de faire venir des cadavres supplémentaires pour faire plus couleur locale. C’était magnifiquement effrayant. Les morts sortaient de leurs tombes, ils ne se contentaient même plus de se la jouer fantôme. Splendide. Enfin, des morts… des os surtout en fait, mais l’effet fonctionna à merveille.

Ensuite, il fallut aller très vite. Ils se regroupèrent tous, tracèrent des signes dans les airs et sur le sol, chantèrent d’obscurs cantiques, et repoussèrent les ‘‘fantômes’’ à l’intérieur de l’Eglise. Jonas expliqua à qui pouvait l’entendre qu’il ne fallait pas les déranger pendant l’exorcisme, avant de disparaitre à son tour derrière les lourdes portes de l’Eglise.

Et maintenant, il était temps d’en finir. Pendant qu’on démontait et cachait ce qui pouvait l’être, les cris des fantômes se firent plus faibles tandis que se renforçaient les chants des exorcistes. Jusqu’à ce que ceux-ci accomplissent leur tâche et renvoient les créatures là d’où elles venaient : dans l’imagination des gens. La nuit était loin d’être finie, et il allait falloir cacher autant que possible toutes les traces de poudre noire ici ou là… il y avait toujours un risque que quelqu’un s’y connaisse assez pour voir la supercherie. Mais pour l’instant, il fallait parler au peuple, et ça, c’était le boulot de Jonas.

Les portes de l’Eglise de Zetting firent grand bruit en s’ouvrant, laissant passer un homme qui semblait plus grand que d’habitude.


« Habitants de Forbach, les fantômes sont partis ! »
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Alicia Loewenstein
Meneuse
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Alicia Loewenstein


La Saint-Jean (#7) Vide
MessageSujet: Re: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeSam 8 Aoû 2009 - 13:32

Tout avait commencé par la messe de nuit de la Saint-Jean. C’était une vieille tradition à Forbach que de fêter la Saint-Jean, héritage païen de Litha, la fête du solstice d’Été, rapidement écrasée par l’Église avec stratégie. Ainsi, alors que tous se dirigeaient vers l’Église pour la fête annuelle sur le parvis, Alicia se dit que décidément la mémoire humaine ne savait pas passer les générations dès lors que la répression sévissait. Cependant, cette année n’était pas comme les autres : point de buffets immenses, point de longues tables installées sur le pavé, point de feu de joie, nul festivité égayant cette nuit noire que seule la pâleur lunaire parvenait à rendre perceptible. Sans la lune et les étoiles cette nuit n’aurait rien été d’autre qu’un grand rien. Alicia caressa la rondeur de son ventre, il était si rond et si parfait, on aurait dit qu’il emprisonnait la lune elle-même. Au château on s’inquiétait du gigantisme du bébé pour l’accouchement, mais on félicitait également Alicia et le Comte - paix à son âme - car c’était signe que l’enfant se porterait bien, il aurait une très solide constitution ! La Comtesse se ravissait de pareils compliments, c’était comme si par cet enfant une part de son aimé allait ressusciter.

Alicia s’était stoppée avec les autres membres du château, encadrés par des gardes aux aguets. Tous restaient là, interrogateurs quant à l’absence de festin. Le prêtre n’avait-il pas suffisamment de subventions pour mener à bien cette fête annuelle ? La future mère avait faim. Ils se tenaient tous debout sur le parvis sombre lorsque les portes de l’Église s’ouvrir en un lourd grincement, laissant s’échapper une lumière chaleureuse et diffuse. Tous se dirigèrent lentement vers les sièges dans la nef, commençant à comprendre. Le curé était là, la mine sérieuse et fatiguée, observant les fidèles et leur expression déçue. Une fois que les portes eurent été refermées l’ecclésiastique débuta un long discours expliquant qu’en ces temps de crise ils ne pouvaient point faire fête tout la nuit durant comme le demandait la tradition. C’eut été une provocation et une prise de risques pour leurs vies que de danser dehors alors que des fantômes rampaient dans les ruelles. Cette nuit ils prieraient pour le salut de leurs âmes et surtout pour le départ de celles qui les hantaient depuis bientôt neuf mois. Alicia soupira, elle avait envie de s’amuser pour une fois et non pas de sombrer dans les bondieuseries dominicales. Cette pensée était insouciante, son état la rendait très lunatique.

Le discours du prêtre dura suffisamment longtemps pour que l’excitation qui était montée en chacun en venant, retombe au plus bas s’approchant d’une léthargie de groupe. L’officiant prononça quelques mots latins que tous scandèrent avant de se replier sur eux-mêmes en joignant leurs mains. Un lourd silence s’installa entre les hauts murs de l’église, portant les prières muettes de dizaines de personnes qui n’avaient plus rien à quoi s’accrocher, qu’à ce Dieu si grand et si haut. Alicia observa soudainement l’assemblée avec une émotion à l’opposé de son énervement premier… Mais alors que son regard embrassait la tristesse de la populace, il y eut un claquement brusque, d’une violence et d’une force impressionnante qui fit sursauter tout le monde. Alors que tous les regards se retournaient vers les portes de l’Église dont l’ouverture soudaine avait provoqué ce bruit résonnant, les bougies moururent subitement, plongeant les fidèles dans une ombre glaçante. Seul l’autel restait légèrement lumineux de par les rayons lunaires qui traversaient les vitraux. Le prêtre devant l’autel restait dans un mutisme du à sa torpeur. On sentie un léger courant d’air frissonnant. Soudain on entendit des plaintes apeurées, on appelait le père afin qu’il voit derrière lui !

Les deux vitraux latéraux et celui du fond, surplombant la grande croix éclairèrent, au dessus de l’autel, trois masses nébuleuses.
« Ce sont des esprits ! » s’affolèrent plusieurs hommes et femmes. Pourtant, nul ne bougea, en l’attente d’une confirmation surnaturelle ou bien par peur que le mouvement de masse n’agite les créatures brumeuses. Le prêtre courbé en arrière observait les entités dont l’anthropomorphisme évident n’était au fond peut-être pas uniquement dû à une hallucination de masse. Le silence revenu dans la salle on entendit un bruit de fond continu, comme un murmure sublimé par le silence. Il disait quelque chose, ou plutôt ils disaient quelque chose, une phrase qu’ils répétaient sans cesse, quasiment inaudible. On pouvait bel et bien reconnaître trois voix, des voix suaves mais pas féminines, à peine humaine. Leur chant était de moins en moins lointain mais toujours aussi diffus. Il y eut une pose, puis une dernière reprise, plus claire. Deux des trois voix répétèrent enfin « Ici vous nous avez tuées », et la troisième de conclure : « Ici vous devez payer ». Les yeux de l’assemblée restèrent dilatés par la terreur. On entendit un résonnement sourd, léger, familier : le glas. On aperçut les trois fumées blanches se répandre dans l’obscurité en un soupire. Une détonation violente et lumineuse, comme un éclair, arracha un cri de frayeur aux fidèles. La grande croix était en feu, faisant danser dans les regards apeurés une lueur folle : c’était leur Fin.

C’est à cet instant que Jonas et ses disciples se levèrent du banc de la première rangée. Ils étaient tous vêtus de la même robe de bure et il fallait l’avouer, ils semblaient irradier de leur grandeur en cette heure ou tous étaient dans l’ombre de la stupeur. Jonas donna ses ordres, les disciples se séparèrent et alors que les voix des trois fantômes entamaient des cris vengeurs dont l’écho glaçait les sangs de l’assemblée, il fit évacuer l’église de Zetting. Alicia regardait effarée l’immense croix catholique au fond de la bâtisse : les flammes léchaient injurieusement le corps du messie crucifié. Après quelques instants de chahut extérieur les portes se refermèrent, enfermant les disciples du Père Marcus et les trois esprits. Bien entendu la Meneuse eut pu être émerveillée par le courage des exorcistes, ou bien bouleversée à l’idée que ces fantômes ne pouvaient qu’être les esprits des trois victimes de la Messe de Cendres, dont sa grande amie Gabrielle. Mais elle n’en fit rien. Elle resta bouche bée, le regard toujours fixé sur les lumières s’échappant des vitraux fumant. Sa dame de compagnie, également sorcière du Lys noir, s’approcha d’elle pour lui demander si tout allait bien. Alicia détacha enfin son regard de l’église pour observer sa consœur, un sourire poli aux lèvres :


« Mon fils veut naître, maintenant. »

Alicia avait été claire quant à ses exigences concernant l’accouchement : Mina. Seule sa Favorite pourrait l’aider à mettre au monde l’héritier. Sa dame de compagnie le savait, aussi ne perdit-elle pas plus de temps. Tandis que tous observaient Saint Jean combattant les démons de Kynopse, Alicia aidée par quelques unes de ses sœurs monta en calèche, quittant discrètement la grande place, sous une pluie d’os humains, en direction des Sous-sols du Château de Frauenberg.
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Europe
Fugitive
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La Saint-Jean (#7) Vide
MessageSujet: Re: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeSam 15 Aoû 2009 - 3:08

[Précédent = Au Clair de Lune]

Une fête.
Comme si la situation s’y prêtait.
Enfin, le mot «fête» n’était pas tout à fait approprié. Il ne s’agissait pas de s’extasier à qui mieux-mieux, de boire des heures durant des breuvages aux vapeurs entêtantes, de bavasser jusqu’à épuiser les sujets de conversation jusqu’à la corde, ni même de se détendre en passant un bon moment. Le principe était simple: se recueillir pieusement, de nuit, pour le salut de son âme. Comme si l’encre stellaire, profonde et stable à mille lieux des insignifiants problèmes inhérents à la nature humaine, allait changer quelque chose ou apporter des éléments nouveaux aux prières de la journée. Mais Europe aurait été tolérante envers cet événement pourtant saugrenu si on ne promettait pas chaque année aux fidèles boisson et nourriture dans l’espoir d’en attirer plus à la messe et de dégonfler artificiellement les chiffres d’absentéisme.

Une fête.
Comme si il y avait quoi que ce soit à fêter!
C’est donc de fort méchante humeur qu’Europe, cette nuit là, sortit du manoir Eléanora-Sun et monta dans son fiacre pour se diriger vers l’Eglise de Zetting. La voir en public était de plus en plus rare et, rien que pour ça, elle détestait de plus en plus ces apparitions, toujours plombées de creuses paroles de réconfort ou de soutien, lancées par des gens hypocrites au possible qui n’avaient en vérité aucune connaissance de ses soucis et s’en fichaient comme d’une guigne. Quoi qu’elles demeuraient un fardeau dont la Prêtresse souhaitait s’affranchir elles avaient tout d’inévitable et c’est ainsi qu’Europe se retrouvait invariablement au même point. Dans la foule.
Lorsqu’elle parvient sur le Parvis, une masse compacte d’individus était déjà présente, silhouettes fluctuantes et bruissantes dans la nuit étrangement sombre. L’air était plutôt frais pour ce début d’été, et la nuit promettait d’être immobile. Grande. Enracinée. Le genre de ténèbres que même la lune n’ose pas déranger alors qu’il est si facile, pour un simple mortel, de la percer d’un murmure.

Les apparitions d’Elena, si elles n’avaient pas disparues, s’étaient beaucoup calmées. Ces derniers mois, Europe était donc petit à petit, en quelque sorte, revenue à la vie. Elle avait cru et espéré que cette délivrance signifierait enfin un repos tant mérité, mais elle avait en fait bien des soucis. Car si son cas s’était atténué, les fantômes n’en continuaient pas moins de hanter Forbach; les Exorcistes étaient toujours sur place, attendant visiblement de faire leurs preuves; et aucun assassin furtif et ingénieux n’avait eu le bon sens de vider le ventre d’Alicia de Sarrebourg de la vie indésirable et déjà pervertie qu’il contenait.
Lorsqu’elle put s’avancer dans la foule, dispersant les importuns d’une main gantée, la Sorcière put enfin voir la raison des murmures. Les tables qui d’habitude se dressaient, pleines de victuailles et synonyme de banquet, manquaient à l’appel. Elle esquissa un sourire ironique: tant mieux. Au moins, elle n’était pas comme tous ces crétins qui avaient «l’antilogique» d’avoir faim en pleine nuit. Le moment de la Saint-Jean avait toujours été selon elle, fort mal choisi pour faire ripaille.

Les grandes portes s’ouvrirent soudain, laissant échapper une chiche lumière qui lui apparut poreuse, vide et organique. Rien à voir avec la magnifique clarté bleuie, minérale et condensée qui baignait l’Eglise dans une atmosphère de lyrisme feutré, alors qu’elle était en pleine conversation avec Louis, cet hiver, sur un banc de Zetting. Elle ne voulait pas l’admettre, mais avec du recul, cela paraissait évident: ce moment avait été magique. Ourlé de sentiments divers, et d’un en particulier. Sentiment qu’en dépit de ses efforts les plus sincères elle avait été incapable de détacher de ce qui était par ailleurs, un chef d’œuvre de poésie harmonique.
Europe s’installa vers les premiers rangs, ahanant comme les autres des mots latins vides de sens. L’heure ne se prêtait guère à une messe et elle manqua plusieurs fois s’endormir; il lui fallait rattraper le sommeil qu’elle avait perdu quand le fantôme d’Elena l’habitait encore de façon omniprésente. Mais heureusement, l’office soporifique s’écourta, ce soir-là. Un claquement soudain sortit brusquement Europe de sa torpeur, et elle dirigea un regard pâteux et gourd sur la porte battante. A ce moment-ci, les chandelles s’éteignirent, la plongeant dans une obscurité au moins aussi bienfaisante que le silence angoissé qui s’était tout à coup installé.


**Voilà qui tombe à point nommé! Je vais pouvoir dormir sans me faire remarquer** pensa t-elle. Mais alors que la Sorcière allait fermer les yeux, elle aperçut comme les autres les trois formes éctoplasmiques flottant en lévitation au dessus de l’autel, leur masse argentée et légère comme un voile de fumée mis en évidence par l’éclat faible et métallique de l’astre lunaire. Les exclamations de quelques hommes et femmes pour porter haut et fort des informations inutiles retentirent comme des bruits délétères et inconvenants.

**Sans rire!** pensa Europe avec ironie. Intriguée mais nullement intéressée, comme déconnectée, hors du temps et étrangère à ce qui se déroulait autour d’elle, la Prêtresse observa les trois formes suspendues dans les airs. Telles des voiles scintillants et légers, elles flottaient, immobiles, diffuses et étrangement belles. Même en se forçant cependant, la Sorcière leur trouva quelque chose de… mécanique. Une raideur qu’elle n’avait pas encore remarqué. Tous les esprits étaient-ils comme ça? Et leurs voix… Elle aurait été incapable de dire si elles appartenaient à une femme, un homme, un adulte, un enfant. Des chants désincarnés, des filaments artificiels. Comme un hymne, Europe sentait monter chez les personnes présentes des vagues de terreur, fluctuantes et intenses. Elle-même resta d’un prosaïsme incongru. «Vous nous avez tuées» : elle ne se sentait pas du tout concernée par l’accusation et pensait, étrangement, qu’elle n’avait nullement à craindre le courroux de ses sœurs. Quand bien même ç’aurait été le cas, rien n’aurait pu lui arriver de pire que ce qu’elle avait vécu avec Elena. Elle en était là dans ses considérations quand la croix s’enflamma dans des lueurs fauves, mordorées, explosives. Un spectacle dont certes elle ne voyait pas le rapport avec le reste, mais absolument saisissant. Si saisissant qu’elle resta là, figée, à l’admirer pendant de nombreuses secondes, sans s’apercevoir que non loin d’elle les Exorcistes prenait tout en charge avec une indéniable maîtrise.
Elle revint soudain à la réalité pour s’apercevoir de la cohue qui l’entourait, les fidèles terrifiés se précipitant vers la sortie dans des cris de peur. Autour d’elle, on se bousculait, voulant être le premier à atteindre les portes de Zetting. Quelqu’un lui cria de se lever et de se dépêcher de sortir.

"Non" marmonna t-elle distraitement, si bas qu’il n’y avait aucune chance qu’on l’entende. Elle voulait rester. Rester et regarder cette croix sacrée s’enflammer, se consumer comme une chair trop molle, trop fragile, la majesté qui sied aux flammes l’envelopper toute entière tel un manteau d’or et de rubis. Une danse d'ombres chinoises, eschatologique et baroque, des coeurs flamboyants qui s'enchevêtraient autour d'un faciès émacié et las, comme déjà résigné à son sort. Un spectacle si saisissant… La voix se fit plus insistante, une main la tira pour la faire lever. "Non!" répéta t-elle plus fort, sans aucun effet. Entraînée par le mouvement de foule, elle finit par sortir sur le Parvis, sur un fond de cœurs liturgiques. Des voix portées par le clair de la nuit, chargées d’espoir artificiel comme un feu agonisant. Des timbres à l’histoire douce, qui semblaient entrer en résonance avec le cœur même de la populace effrayée, répandant ses échos…

Dès lors, ce fut un chaos mêlé de vide: les portes se refermèrent, la coupant de son spectacle hypnotisant de la croix en flammes comme on coupe un cordon ombilical, tandis qu’autour d’elle le monde explosait, se résumait à des fleurs pourpres et ambrées s’épanouissant dans la nuit, des cris terrifiés, des chants transcendants, des râles étouffés, des pluies d’ossements ivoiriens marbrés de souillures jaunes... Bref, un amas de confusion, qui tentait de lui transmettre un message… Les murmures se répandirent comme des traînées de poudre, colportant les rumeurs les plus diverses. Les feux semblèrent devenir liquide, dilatés, dansant devant le regard d’Europe tandis qu’elle cherchait encore des yeux ce spectacle si saisissant, unique, épuré… on le lui avait retiré, soustrait à sa contemplation… à présent un combat féroce mais curieusement étranger à ses préoccupations semblait se dérouler à l’intérieur, un combat dont on n’entendait que le fracas et ne voyait que les esquisses dans ces langues de feu qui semblaient vouloir lécher le ciel… Enfin, les plaintes refluèrent, les brasiers s’éteignirent, le calme revint, tandis que le dirigeant des Exorcistes dont elle avait oublié le nom sortait victorieux sur le Parvis, clamant à tous ce qu’ils avaient besoin d’entendre. A présent, tout était fini. Ils avaient triomphé, elle devrait sans doute tôt ou tard admettre son tort. A présent, tout était fini. Ils avaient réussi l'inpensable, ranimer l'espoir et chasser les esprits. Tout était fini. Ils lui avaient retiré son spectacle le plus magistral, le plus unique, le plus saisissant.

Elle avait vu une ode à la pure beauté.


[Suivant = Oh Belle Dame... que ta volonté s'accomplisse]


Dernière édition par Europe le Mer 21 Oct 2009 - 19:33, édité 1 fois
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La Saint-Jean (#7) Vide
MessageSujet: Re: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeJeu 20 Aoû 2009 - 1:49

D'après ce que l'on entendait à Forbach, la Saint Jean était plus une occasion de faire la fête, que de célébrer un quelconque dieu. Vestige d'un rituel païen, il s'érigeait au milieu du calendrier, comme un pied de nez au christianisme. Cette pensée fit sourire Kerwan qui se fichait éperdument de savoir qui contrôlait sa vie. Il aurait parfois voulu y croire, à ce Dieu unique, et d'ailleurs, parfois, il y croyait. Mais voilà, l'exorciste n'était pas pratiquant et refusait de se restreindre. Il voulait vivre sa vie comme il l'entendait, et si Dieu l'avait écrite à l'avance, alors grand bien lui en fasse ! Peut-être irait-il boire un coup avec Dieu, lorsqu'il mourra, ou peut-être que son âme ira rôtir en enfer.
Cette année la fête de la saint jean était triste, morne, d'un gris presque palpable, et Kerwan s'ennuyait tellement en écoutant l'église se remplir derrière lui qu'il souhaita mourir l'espace d'un instant. Il était difficile de rester là, assis dans une attitude pieuse, tout en sachant que le spectacle allait bientôt commencer... Et quel spectacle !

Jonas, ce virtuose de la mise en scène avait triplé ses moyens. A grande cause, grands mensonges, fallait-il croire. Il avait fait venir d'autres exorcistes en renforts en peu de temps, tout en menant une enquête auprès de la population. Enquête à laquelle Kerwan avait participé, bien sûr. S'il s'ennuyait souvent, il n'en restait pas moins inactif. Il se souvenait encore clairement de sa discussion avec la Comtesse, et sa rencontre avec une rousse, pauvre paysanne boitant sur un chemin de terre. Il se souvenait clairement avoir eu des doutes, en écoutant leurs histoires, mais aussi de cette soudaine envie d'y croire. Il avait bien tenté de les persuader qu'il n'y avait rien. Ils auraient pu économiser du temps, et de l'énergie en repartant ainsi, mais personne n'avait voulu entendre quoi que ce soit, et la Comtesse, cette redoutable femme à la beauté imparable, avait laissé échapper quelques bribes d'histoires qu'il n'avait pu résoudre depuis. Les idées ne manquaient pourtant pas d'affluer.

Ces quelques mois passés à Forbach n'avaient été qu'intriguant. Si Kerwan ne croyait pas aux fantômes, il lui était difficile de rester camper sur ses opinions. La ville recélait de secrets, un monde dont on lui refusait l'entrée. Ses compagnons ne semblaient pas partager ses doutes, personne jusqu'alors n'en avait parlé. Il suffisait de voir l'enthousiasme de Jonas pour se rendre compte qu'il ne ressentait pas plus que le comédien jouant la comédie. L'ecclésiastique laissa échapper un bout de sourire qui s'envola aussitôt.

La messe commençait. Le silence installé, le curé pouvait commencer son office. Kerwan fixa un point au loin, comme absorbé par un ailleurs, prêt à sauter sur ce qui pourrait en surgir. Ses lèvres psalmodiaient comme mécaniquement. Sa tête comptait déjà les secondes.
Et ce fut enfin le moment. Un vitrail du fond explosa, et la grande croix prit feu. Ce fut le signal du départ. Il se leva lentement, tout comme ses complices, épousseta sa bure calmement tout en écoutant les ordres que lançait Jonas. Il n'avait, à vrai dire, même pas besoin de les écouter tant il connaissait le déroulement des évènements. Il connaissait son rôle jusqu'au bout des doigts. Ç'allait être le moment de gloire du Frère Kerwan. Exécutant les ordres donnés, il demanda à la population de sortir de l'Eglise. Chose qu'il n'avait même pas besoin de demander au vu de la cohue qui régnait. Il s'assura donc que personne ne restât à l'intérieur. Du coin de l'œil il vit la Comtesse dont l'aura de calme brillait en un éclat aveuglant, ainsi que la Dame Europe. Ses instincts auraient pu se réveiller à sa seule vue, s'il n'avait pas été en cet instant Frère Kerwan. Il n'était plus l'assoiffé. Plus pour le moment.

Tout le monde s'évada de l'église, restant bouche bée devant le spectacle qui s'était offert à eux. Des esprits, là, aussi proches que leur voisin... aussi réel ! ... Ah ! S'il savaient à quel point ils sont dupes ! Kerwan se retourna vers Jonas pour voir comment ils se débrouillaient à présent, hocha la tête, et sorti de l'Eglise à son tour. Il était là pour montrer à quel point les exorcistes étaient présents, et essentiels en cet instant. Il criait aux gens de rentrer calmement chez eux, les suppliant parfois de faire une prière avant de refermer leur porte. Il dictait les mots latins à prononcer pour se protéger du mal. Il ricanait bien intérieurement.
Le cimetière semblait possédé, lui aussi. Comme le stratagème était audacieux ! Jonas étonnait toujours les exorcistes, mais aujourd'hui, en rassemblant les idées de chacun, il avait fait un spectacle inoubliable. Les gens fuyaient l'endroit en hurlant que les morts revenaient à la vie. Que les morts voulaient se venger. Kerwan comprit soudain que l'évènement qu'ils créaient aurait un impact non négligeable sur l'histoire des sorcières qui courrait dans la ville. Seraient-elles à craindre, même après leur mort ?

Tout en faisant attention à ce que personne le remarque, Kerwan fit exploser quelques tombeaux. Le système était discret, car il suffisait de poser le pied au bon endroit, au sol, pour déclencher une explosion. Il dû éviter quelques gravas qui lui retombaient dessus, et puis remis le rôle de manipulateur dans sa poche pour en ressortir celui d'exorciste. Il psalmodia quelques mots latins qui furent repris par deux ou trois exorcistes postés dans le cimetière. Des gens observaient la scène, le cimetière commençait à se calmer. Sans s'arrêter, il fit signe aux autres de le suivre, signant dans les airs, sur la terre, et psalmodiant, ils retournèrent lentement à l'église, suivant les effets sonores et lumineux qui ne rendaient pas leur marche ridicule. Les portes de Zetting se refermèrent sur eux.

C'est à ce moment là qu'il fallait faire au plus vite. Tandis que certains lançaient des objets lourds sur les portes, d'autres mettaient l'église dans un état digne d'une grande guerre. On se salissait et se frappait même pour donner l'impression d'avoir reçu un coup. La lèvre coupée, grimaçant et grognant, l'exorciste poussa celui qui venait de lui mettre un coup par surprise. Il y avait tant de choses à faire que ce genre de détails (qui touchaient à son physique) ne lui semblaient pas important. Il fallait ranger le matériel, faire jouer les sons et les lumières de sorte que, de l'extérieur, l'on puisse penser que la bataille faisait rage. Les explosions de lumière, les sons, les chant. Tout devait leur faire croire que les esprits s'en étaient allés.
Ce fut Jonas qui sonna la fin du combat, régulant les intonations tel un musicien. Et lorsque tous se turent, dans un silence pesant, tous se regardèrent. La question flottait déjà au bord de toutes les lèvres, et à vrai dire, il n'y en avait pas qu'une.

Jonas encore ouvrit les portes pour parler aux gens. Se rapprochant du meneur du groupe, Kerwan jeta un coup d'œil à l'extérieur, sur tous les visages étonnés, heureux, émerveillé. La désagréable impression d'être dans un nuage l'étreignit, et la nausée le gagna. Qu'il détestait ce passage là ! Ses yeux parcouraient l'assemblée à la recherche de visages connus. Bien sûr, il y en avait, mais celui qu'il voulait voir était celui de la Comtesse. Il voulait l'observer. L'avis des inquisiteurs lui importait peu, ils n'étaient pas ici pour jouer la concurrence, mais faire sortir des esprits.
Avaient-ils réellement réussi ?
Malgré ses efforts, l'exorciste n'arrivait pas à voir le visage qu'il cherchait. Ses yeux se tournèrent alors vers le ciel, soudainement étreint par une question à laquelle il ne s'attendait pas : Et maintenant ?
Pourrait-il jamais reprendre la route et son ancienne vie alors que cette ville ne lui avait pas encore livré tous ses secrets ?
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Constance Edelgard
Oblivius
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MessageSujet: Re: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeJeu 20 Aoû 2009 - 23:04

Constance avait levé la tête du poitrail de son Epoux, attirée par un silence de mort, ou plutôt, le silence qui peine à laisser les mots reprendre, de celui qui est lourd, car on attend. L'immense foule des villageois de Forbach attendait, comme la Duchesse, face au désert sonore qui désormais les étourdissait. L'absence de hurlements, de cris de terreur ou de palabres divins, les chants sacrés marmonnés, les sifflements stridents, les explosions et les flammes qui crépitent, jusqu'aux étincelles bruyantes qui laissaient un bruissement sourd dans les oreilles, tout ceci n'était plus désormais.

Et pourtant, combien de temps eurent-ils, tous, pour écouter la cacophonie étourdissante de toute cette scène d'apocalypse, combien de temps purent-ils, tous, craindre l'échec des Exorcistes face aux esprits revenus des Limbes, les Fantômes de Trois Sorcières, brûlées au Bûcher ? Comment ignorer les images qui restaient gravées dans les yeux, au plus profond de la rétine, alors que tous priaient, Constance la première ? Louait-elle le Seigneur pour les mêmes raisons que les Habitants de Forbach ?

Sans doute non... Mais enfin, chacun souhaitait intimement le calme, la paix et priait le Trés-Haut de redonner à leur vie la quiétude tant chérie, aujourd'hui disparue à cause des Évènements Surnaturels qui sévissaient ? Alors, la Duchesse semblait partager une partie de ces prières. Elle avait serré les doigts si fort qu'elle ne sentait plus ses articulations, priant pour le Salut de son Âme, alors qu'en ces soirs-là, étranges, la Raison nous fait défaut, qu'elle défaille, et que les peurs les plus irréalistes et les plus horribles nous assaillent.

Mais ses louanges avaient été coupées par l'apparition Diabolique des trois Esprits, et bientôt, elle fut prise dans les mouvements de foule : panique, terreur, elle lisait sur les visages livides l'incompréhension et parfois même, le désespoir des choses que l'on souhaitait fausses, et qui finalement, nous crèvent les yeux. Constance avait hurlé, elle aussi, sans songer à l'Etiquette, et avait été des premières à vouloir quitter l'Eglise. A toutes jambes, elle avait enserré la main du Duc, présent à ses côtés, et, plus rapide qu'elle, il l'avait entrainé au dehors. Alors, elle avait eu l'occasion de marcher sur quelques pieds -ou mains- de bousculer vieillards ou jeunes enfants, pour s'assurer d'être dans les premières hors de la Nef... L'instinct de survie ?

Lorsque la populace se retrouva sur le Parvis, ce fut une explosion : Angoisse ou Espoir soudain, on disait déjà loin que les Exorcistes étaient là pour rendre à Forbach son calme, et alors que les manœuvres commençaient déjà, dedans, dehors, dans des vols effroyables de cadavres, dans des gerbes d'étincelles, dans des hurlements à faire frissonner la Mort elle-même, beaucoup autour de Constance s'agenouillèrent pour prier. Comptaient-ils aider ces Saints Hommes à vaincre les Démons ?

Mais ceci, la Duchesse eut du mal à correctement le voir, car malgré les couleurs d'Enfer qui illuminaient les visages, elle se trouvait dos à l'Eglise, le front contre le torse d'Octave, tremblant de peur, et marmonnant des jurons à faire pâlir une None. Car, par delà la panique qui la gagnait à la vue des Esprits, sans doute la déception l'avait-elle rendue plus à vif : la fête de la Saint Jean était une occasion de croiser Christian, au moins l'apercevoir, sans bien sûr lui parler mais... le voir, juste quelques secondes, un signe de tête peut être...
Elle avait espéré aussi pouvoir y trouver Elisabeth, avec qui elle avait développé une relation d'amitié qui devenait même de la dépendance, sans qu'elle ne puisse l'imaginer ou se l'expliquer...

Eh puis, alors que désormais le silence rompait les tympans, les lourdes portes de l'Eglise grincèrent comme un gémissement des entrailles de la Terre. Là, Constance releva la tête, observa les visages entre horreur et béatitude, tout en se tournant vers les quelques marches qui menaient à l'Office Religieux. Là, se tenait un homme. Un Exorciste. Elle avait entendu les Servantes en parler au Manoir, il était celui qui dirigeaient les autres Disciples, à en croire les mots des Domestiques... Il s'avança vers la foule, et Constance se mit sur la pointe des pieds pour le voir de façon plus nette. Ce ne fut que lorsqu'il ouvrit la bouche pour parler d'une voix digne des plus Sages des Saints, des plus Valeureux Chevalier, et des plus Pieux des Monarques que la Duchesse dut pousser la tête mal coiffée d'une petite femme, sans doute pauvrette, qui lui barrait la vue.

C'était un Miracle. Eux qui étaient envoyés par le Pape avaient vaincus les Fantômes... La Capricieuse Edelgard joignit ses mains, le sourire aux lèvres : un infini souffle d'espoir semblait bercer les Villageois, qui auraient prit chaque fragment de lune pour une preuve nouvelle du triomphe des Exorcistes. Serait-ce là les prémices des prochaines années, sans le froid, sans le Malin, sans les Sorcières, à Forbach ? En cet instant, Constance en était persuadée.
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Laszlo Plattz
Oblivius
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MessageSujet: Re: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeDim 23 Aoû 2009 - 14:40

Pour les spectateurs de leur Art, ce serait une nuit de flammes, de hurlements et de couleurs brouillées. Oeil et oreille en déroute, le tableau sonore resterait imprimé au plus profond du tympan et de la prunelle de chacun.

Mais pour Laszlo et les autres, ce serait avant tout histoire d'odeurs. Chaque exorcisme passé se rappelait à ses souvenirs par une forte fragrance de musc. Les pores des disciples exhalaient l'effort et la peur d'une supercherie éventée. La sueur, Laszlo ne l'avait que peu connue jusqu'à son entrée dans la confrérie. Les eaux des marais absorbait les odeurs corporelles comme les vies de ses habitants. A tel point que lors de sa première représentation, le jeune homme s'était demandé qui pouvait bien exhaler ce parfum insupportable.
Tous les exorcistes exécutaient leur ballet de destruction dans une parfaite synchronie. Laszlo, à son tour, s'était élancé. Son rôle, cette fois-ci, lui assurait un relatif confort. Cette fois-ci, il restait à l'arrière-plan, ombre fugace, se débattant aux quatre coins de l'église. Sur son dos, un haillon de tule dessinait dans l'air les arabesques d'une lutte improbable.

Entre deux pas de son ballet, Laszlo activait les mèches placées un peu plus tôt le long de la nef. Ni flamme ni explosion, mais l'émergence de lueurs qui ne semblaient pas de ce monde. L'idée était venue quelques mois plus tôt : des lueurs mouvantes, froides, qui accompagneraient la symphonie de destruction des exorcistes.
Tout l'art du chargé de ce poste consistait à ne jamais interrompre sa lutte fantasmatique, les lueurs d'apocalypse semblant naître de la joute entre l'homme et le fantôme.


Un pas, une feinte... Un claquement de talons, pour créer l'étincelle propice... Danse de frustration, ce soir.

Car Laszlo boue intérieurement. Une cacophonie au moins égale à ce qui se passe dans le bâtiment éclate sous son crâne. Le rituel est parfaitement exécuté, les choses ne pourraient pas mieux se passer... Si seulement Forbach les acceptait. Ce sentiment, Laszlo ne parvient à l'évacuer depuis plusieurs semaines. Il reconnaît, dans le public attroupé là, nombreux de ceux avec qui il a parlé. Nombreux de ceux qui continuent à tisser la bourgade d'un tissu de mensonges. Nobles, paysans et indéfinissables. Tous observent les exorcistes avec intérêt, mais sans changer d'un iota leurs habitudes et leurs intrigues.

Un temps. Un hululement d'effort et un nouveau tour sur soi-même afin d'entretenir l'illusion. Et l'illumination d'un nouveau foyer de feu froid, à quelques pas de l'autel.

Qu'y a-t-il derrière vos masques, habitants de Forbach ? Ironie, indifférence ? Ou gourmandise devant notre impuissance à vous convaincre ? Si je saisissais votre crâne entre mes doigts, resterait-il autre chose que ce brouillard infect ?
Surtout ne pas perdre le rythme. Poursuivre cette danse, aussi futile qu'elle soit. Car elle est tout ce qui reste aux disciples du Père Marcus.
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Joan Witham
Mort(e)
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MessageSujet: Re: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeMar 25 Aoû 2009 - 0:36

La Saint-Jean.

Mais qu’avait-elle de sainte cette fête? On fêtait bien depuis des lunes une fête aux alentours du 21 juin, mais cela remontait à bien avant l’avènement de l’ère chrétienne dans ce monde. Cette date marquait le solstice d’été, la fête du soleil en l’honneur duquel on allumait de grands feux pour célébrer sa lumière bienfaitrice. Aujourd’hui, on disait les feux de la St-Jean… On avait décalé la date de quelques jours, et puis on avait volé sa fête au soleil pour l’affubler à la soi-disant parole divine qui avait fait annoncer l’arrivée d’un sauveur par Jean le Baptiste.

Un sauveur.

Pour sauver qui de quoi? Quel sauveur se trouvait à Forbach en ces temps gris où l’humanité ne cessait de se morceler? C’était au nom de ce sauveur qu’on se permettait les pires atrocités. C’était en son nom qu’on allumait aujourd’hui des feux pour purger le mal de la société… On brûlait ceux qui ne s’y conformaient plus avec l’objet de leur propre culte. L’ironie était palpable.

Mais en tant que sorcière, il fallait se conformer à cette tradition barbare comme tous les autres, au risque d’éveiller les soupçons. Ainsi Joan se trouvait là, assise dans une des rangées à la gauche du petit Léonce, pendant que ses parents se tenaient à la droite de celui-ci. La jeune gouvernante fixait un point invisible devant elle d’un regard vitreux et d’un visage figé dans une expression ambiguë. Était-elle assidue à la messe, ou alors son demi-sourire n’était que pure arrogance? La réponse était aisée à répondre seulement si on savait ce qui se cachait dans le cœur de Joan. Mais personne ne pouvait savoir. Personne ne pouvait savoir que c’était Gabrielle de Mortelune devant qui Joan avait capitulé par épuisement. La jeune rouquine était toujours là, elle voyait et entendait tout, mais elle refusait de réagir. C’était inutile de toute façon et puis, malgré elle, elle commençait même à avoir de l’empathie pour l’entité qui l’habitait. Après tout, même du Lys Noir, Gabrielle avait connu ce sort que toutes les sorcières redoutent. Après tout, elle était une sœur, elle aussi.

Ainsi Gabrielle écoutait la messe.

C’était d’un ennui mortel comparé à ce qu’aurait pu être la réelle fête du solstice d’été. Si au moins il y avait eu les feux de joie, peu importe en l’honneur de qui, cela aurait été bien plus réjouissant qu’une messe. Plutôt que de se concentrer les paroles sans intérêt déblatérées par le curé, elle observa ce qui l’entourait. Ah, il y avait bien des choses qui avaient changé depuis qu’elle avait quitté ce monde. Elle ne put passer outre le fait que la Meneuse du Lys attendait un heureux événement. Cela contrariait Gabrielle d’être morte. Elle aurait pu célébrer avec ses sœurs, elle qui aimait tant la fête. Mais de fête, elle ne vivrait plus jamais. Sauf peut-être celle qu’elle ferait subir à Louis Institoris. Ah oui. Justement le beau Louis… Non ce n’est pas lui qu’elle remarqua. C’est l’énergie d’une belle sorcière d’Olrun qu’elle capta. Europe… Oui, la tâche allait peut-être être plus ardue que prévue. En tant qu’esprit pur, Gabrielle pouvait lire le cœur des gens, et celui d’Europe Eléanora-Sun transpirait d’une encre rouge pour l’inquisiteur. Détournant le regard du sermon, Gabrielle trouva la sorcière dans la foule au travers des yeux de Joan.

Mais son attention ne fut pas retenue longtemps par Europe, car au même moment, la croix derrière le prêtre explosa de mille feux. Un sourire spontané apparu sur le visage de Joan. *Le voilà enfin, le feu de la St-Jean!* songea Gabrielle réjouie. Mais ce qui suivit, même l’esprit n’aurait pu le deviner. Trois silhouettes fluides et vaporeuses émergèrent de ce feu. *Mais quel genre de foire est cette messe?!*. Il ne fallut pas longtemps à Gabrielle pour réaliser qu’un de ces stupides mannequins pendouillant du plafond devait la représenter, elle, une des trois sorcières victime de la Messe de Cendres. Ah vraiment, cette journée n’échappait pas à l’ironie. Cette situation n’eut comme effet que de faire ricaner Gabrielle. Sans doute détonait-elle dans l’ambiance, alors que tout le monde fuyait en hurlant aux fantômes. Tout le monde se pressait vers la sortie. Gabrielle aurait bien voulut en voir plus, mais la foule la poussait… Elle empoigna fermement la main de Léonce et suivi la parade.

Au-dehors, les gens étaient terrorisés. La rumeur s’élevait dans un brouhaha à l’image de la poussière qui se soulève sur le passage des calèches lorsque le sol est sec. Jouant à la bonne gouvernante, Joan pris le jeune Léonce dans ses bras. «Tu as aimé le spectacle Léonce? J’avoue que j’ai presque cru que ces mannequins étaient de vrais fantômes. Malgré tout, j’ai adoré.»

Puis, l’imposteur sorti de l’Église. Apparaissant tel un ange salvateur des pauvres âmes ignorantes se trouvant devant lui, il offrait à Forbach un remède imaginaire. Scandant que les fantômes avaient disparus… Oh, le mensonge est un vilain péché prêtre! Cherchant son regard, sans jamais savoir si elle le trouva réellement, Gabrielle cligna de l’œil en sa faveur avant de tourner les talons pour rejoindre les parents de Léonce.
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Octave Edelgard
Mort(e)
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La Saint-Jean (#7) Vide
MessageSujet: Re: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeDim 6 Sep 2009 - 21:45

Octave ne savait que penser de cette journée, des derniers évènements. Les fantômes étaient bien réels, il l'avait à présent accepté : les étranges manifestations qui avait agité sa demeure et l'appréhension qu'il ressentait de plus en plus ne laissaient plus de doute. Le Duc n'était pas homme à se laisser effrayer ni à douter ; mais à l'idée que ses crimes reviennent littéralement le hanter, il ne savait que penser. Malgré tous les indices, malgré la vérité derrière ces hantises, il ne savait comment il réagirait, si ce jour terrible venait à arriver.

Pour l'heure, il tenait sa femme dans ses bras, avec une fermeté nerveuse. Le silence n'annonçait rien de bon, et malgré la présence des Exorcistes, Octave ne s'aventurait pas à espérer. Un filet de suspicion s'accrocher au fond de son esprit : les fantômes étaient bien réels, mais cela blanchissait-il leur ennemis de tout soupçon ? Octave ne pouvait totalement ignorer la réputation qui accompagnait cette étrange troupe.

Malgré tout le spectacle, miracle de musique, de cris et de lumière glorieuse, bataille épique contre morts, spectres et damnés, Octave ne savait que penser. Le choc et la résignation se lisaient sur son visage : qui aurait pu ignorer les horreurs qui s'étaient déployés sous ses yeux ? Tant de choses extraordinaires. L'espace d'un instant, la surprise avait entièrement saisi les traits du Duc, lorsqu'il avait entendu son épouse se réfugier elle aussi dans la prière. Mais après tout qui d'autre que Dieu aurait pu les sauver, face à tant de mal ?

Octave ne s'était pas posé la question. Il avait couru, il avait prié, il avait protégé Constance de son corps, avec sur le visage l'air déterminé d'une bête acculée. Mais alors que le silence pesait sur tout Forbach, il ne se permettait pas d'espérer. Le terrible combat était empli de gloire et de fureur, mais le Duc savait, pour avoir plusieurs fois senti Sa main, que Dieu agissait de subtile manière. Son esprit sévère de protestant se trouvait curieusement offusqué que les miracles du Seigneur, et les tourments de son Ennemi, se manifestent avec tant de pompes.

Et malgré les quelques murmures optimistes qui circulaient parmi la foule, malgré la foi que tous plaçaient en les Exorcistes et leur art, Octave ne laissait pas aller à l'espoir : le Duc n'espérait pas, il avait cessé d'attendre quoi que ce soit depuis qu'il avait vu le corps de son épouse étendu à ses pieds. Maintenant comme en toutes choses, il s'en remettait au jugement de Dieu.

Puis les prières furent exaucées, l'espoir fut récompensé et le miracle s'accomplit. Entre les portes, ouvertes avec fracas, s'avança un homme nimbé de lumière. Il étendit les bras comme un Roi et annonça à tous la victoire. La joie se répandit comme une traînée de poudre pour soulager la terreur du peuple.

Etait-ce possible ? Les spectres rendus au repos, leur influence dissipée...Pendant un long instant, Octave crut qu'enfin, le Seigneur l'avait délivré de ses péchés, exorcisé ses tourments et renvoyé dans la tombe le souvenir glacial d'Agnès. Un sourire de délivrance apparut sur ses lèvres...Puis il y eut un doute, il y eut une légion de questions : qu'en était-il de la réputation des Exorcistes ? Comment pouvaient-ils vraiment être les sauveurs annoncés, si tant de soupçons les entouraient ? Comment le bannissement de trois esprits aurait-il pu débarrasser toute la région du mal ? Et fallait-il croire qu'un tel déploiement de sainteté avait suffit à chasser spectres et Sorcières ?

Octave ne voulut pas y penser. Il n'était pas homme à douter et ne se posa pas ces questions. Un sourire sincère aux lèvres, il laissa s'échapper une exclamation de joie et embrassa fougueusement son épouse.

Maintenant comme en toute chose, il s'en remettait au jugement de Dieu...
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Adrien D'Hasbauer
Mort(e)
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Adrien D'Hasbauer


La Saint-Jean (#7) Vide
MessageSujet: Re: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeDim 4 Oct 2009 - 0:02

La Saint-Jean… Encore une fête, une fichue soirée gaspillée à faire autre chose que les tâches qu’il aurait du effectuer. Adrien n’était pas du genre à ne rien fêter, et s’il n’avait pas été aux rennes de Forbach depuis quelques mois, il aurait sans doute prit du plaisir à y aller avec sa femme et ses enfants, comme d’habitude. Mais hélas, la donne avait changée et il y avait beaucoup à faire maintenant, aussi n’avait-il plus le temps ne serait-ce même que de consacrer suffisamment de temps à sa propre famille, alors une fête ! Il devait l’admettre, si son cousin était un homme responsable, beaucoup d’affaires trainaient et Adrien avait beaucoup de mal à y mettre un terme rapidement pour clore les dossiers et s’occuper de ce qui commençait à s’empiler sur son bureau. C’était d’ailleurs très décourageant pour lui, car malgré la charge de travail qu’il abattait tous les jours, il ne parvenait pas à réduire la quantité dévolue au jour suivant. Il avait un excellent aide de camp par le biais de son ami, mais Adrien refusait de le laisser travailler au-delà d’une certaine heure. Lui aussi avait une famille et le Vicomte n’acceptait pas l’idée qu’il puisse le priver de voir ses enfants. Bien sur, il essayait de refuser, de prétexter qu’Adrien lui aussi avait une famille et qu’il devait voir ses enfants, mais dans ces moments, il répondait simplement que c’était à lui de s’occuper de cela, et prendrait du « bon » temps lorsqu’il en aurait enfin fini. Bien sur, les nuits presque blanches s’enchainaient et jamais il n’avait de temps pour lui, ne serait-ce que pour manger. Il voyait très peu ses enfants, ou plutôt son enfant, car sa fille avait disparu sans laisser de traces… Sa femme lui manquait horriblement plus chaque jour… Il se demandait parfois s’il ne valait pas mieux que tout cela cesse, et venait alors l’idée qu’il pourrait bientôt le faire. Alicia attendait un enfant, et Adrien espérait de tout cœur qu’il s’agisse d’un garçon. Son cousin aurait ainsi un héritier et le Vicomte pourrait ainsi faire une demande de régence de Forbach par un tiers. Le pouvoir ne serait plus de son ressort et tout reviendrait dans l’ordre. Il s’occuperait de sa femme, de son fils et rechercherait sans relâche sa fille…

C’est à cela que réfléchissait le Vicomte alors qu’il approchait de l’Eglise de Zetting avec sa femme. Léonce était avec Joan, sa nourrice, mais non loin d’eux. A défaut de ne pas vouloir fêter quoique ce soit, Adrien avait saisi le prétexte pour passer un peu de temps avec son fils. Toutefois cette nuit, il n’y aurait rien à fêter, le prêtre semblait convaincu du danger que représenteraient ces frivolités en ces temps troublés et préférait réunir sa paroisse dans un dévouement religieux relatif en priant Dieu pour que tout cela s’arrange au plus vite. Adrien ne pouvait qu’appuyer un peu la décision du prêtre, mais il aurait préféré que la fête soit tout bonnement annulée, quitte à passer la soirée dans ses appartements avec son fils et sa femme plutôt que de prier. A quoi bon croire un Dieu quand on sait que les Hommes ont le pouvoir de changer les choses eux-mêmes ? Si seulement, ils savaient tous… Si seulement ils comprenaient que Dieu résidaient en eux, si seulement ils arrêtaient d’obéir à quelqu’un ou quelque chose dont ils ignorent l’existence, si seulement ils cessaient de s’aveugler à l’aide d’une Foi qui est surement, pour la grande majorité d’entre eux, aussi vacillante que le brin d’herbe sous la brise légère. Alors les choses iraient mieux, alors l’Homme serait aussi bon et vertueux que les textes sacrés le disent, alors il n’y aurait pas besoin de croire, car cela serait une réalité quotidienne…

C’est ainsi qu’Adrien priait, les mains jointes, faisant simplement comme tout le monde pour préserver les apparences. Mais il ne priait pas un Dieu, ou quelconque instance supérieure pour que le monde change, il priait simplement pour que les Hommes se rendent compte de leur bêtise et se remettent eux-mêmes sur le droit chemin. Cela viendrait un jour, il en était certain, mais cela prendrait surement du temps. Pourtant il fut interrompu, comme tout un chacun dans la chapelle, par l’apparition des trois spectres, enfin des masses nébuleuses et blanchâtres flottant au-dessus d’eux dans des promesses de morts. Comme tout le monde, le Vicomte ne passa pas outre la stupéfaction, mais elle fut bien courte et il savait suffisamment garder son calme pour ne pas sombrer dans une panique plus futile qu’utile. Tenant la main de sa femme, il regarda calmement les évènements s’enchainer et observa avec surprise la croix s’enflammer. Les flammes dansant dans son regard, il observa avec fascination le feu bruler le bois qui craquait sous la vivacité du brasier. Un avertissement ? Une réalité ? Un canular ? A vrai dire ce genre de question ne lui passait pas vraiment par la tête à cet instant. Son regard se tourna vers son fils. Joan semblait garder son calme et visiblement, elle était en mesure de gérer la situation aussi bien que lui. Il laissa donc son fils au soin de sa nourrice avant d’emmener Elisabeth avec lui. A quoi bon rester dans l’Eglise ? Les exorcistes devaient faire leur travail, tant mieux, il pourrait faire le sien.

Une fois dehors, il observa un peu le spectacle, car il fallait le dire, s’en était bien un. Hélas, il n’était pas d’humeur, et cela lui offrait plus une diversion qu’autre chose. Mais pas qu’à lui visiblement. Ses yeux se portaient sur la calèche qui remontait vers le château, et il n’eut pas de mal à la reconnaitre.
Alicia avait quelque chose en route, et il ne savait pas quoi, mais quelque chose lui disait qu’ils sauraient tous bien assez tôt. Quoiqu’il en fût, il se retourna vers sa femme, lui dit qu’il n’était pas trop en forme et préférait aller se coucher. Il avoua à haute voix « être persuadé que les Exorcistes feraient le nécessaire et qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter outre mesure », ce qui tenait plus de l’esbroufe qu’autre chose, et sa femme devait sans doute l’avoir remarqué. Il lui dit ensuite qu’il l’aimait et l’embrassa avant de récupérer son cheval et de remonter vers le château lui aussi, laissant derrière lui les bruits d’explosion et de chants.
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Ecaterina Gavril
Oblivius
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MessageSujet: Re: La Saint-Jean (#7)   La Saint-Jean (#7) Icon_minitimeJeu 8 Oct 2009 - 12:52

La Saint-Jean, la fête joyeuse du feu des moissons.

Par pure curiosité, Ecaterina avait quitté son petit manoir pour assister à la messe. Ses bras fins appuyaient sur sa canne de sorbier aux runes dissimulées par une gaine de cuir souple. Proche de la sortie, elle se tenait debout au fond de la nef. Avec sa longue cape bleu nuit dont le large capuchon couvrait sa tête, la jeune femme évoquait une ombre perdue dans l'ombre.

Ça faisait environ deux semaines qu'elle était ici à Forbach, et la messe était l'occasion d'apercevoir les plus importants des visages inconnus. Bien qu'elle préférât la solitude lorsqu'elle ne se consacrait pas à l'apprentissage de la magie, l'ermitage n'était pas une bonne façon de se fondre dans la masse.
Les deux mains blanches solidement jointes sur le pommeau rond de sa canne, elle fixait un point devant elle. Son expression jouait une profonde piété alors qu'elle se désintéressait du sermon puant la peur.

Les fantômes errant dans la ville... La jeune Roumaine n'était pas de celle qui désirait leur disparition... Depuis des nuits, Andrei lui apparaissait dans ses songes. Au réveil il ne lui restait qu'une vague sensation de présence, un souvenir flou, des mots inaudibles. Il lui était difficile dans ces conditions de définir s'il s'agissait de banals rêves ou de véritables apparitions oniriques. Pour se consoler, dans un instant de faiblesse, elle avait tendance à croire qu'il s'agissait bien du fantôme d'Andrei.
Il lui manquait. Et surtout, elle se sentait coupable de sa mort.
Si seulement elle l'avait écouté... il serait encore à ses côtés.

La jeune fille en était là dans ses tristes pensées, l'esprit coupé du monde pendant ce bref instant de souffrance intérieure. Elle ne se rendit même pas compte qu'une larme avait tracé un sillon le long de sa joue pâle.
Ce fut le moment choisi par les fantômes des trois sorcières pour envahir les lieux. Du moins, le semblait-il. Elles non plus, Ecaterina ne souhaitait pas leur renvoi dans les Limbes. Leur vengeance était juste et la Roumaine leur souhaitait même de l'accomplir.

La foule prise de panique se ruait déjà vers la sortie. Ne désirant point mourir piétinée par des imbéciles, Ecaterina sortit la première. Elle se pressa pour garder une distance de sécurité entre elle et les badauds avant que le spectacle ne commence. Un regard à la ronde, et elle vit la Meneuse au beau ventre quitter les lieux en voiture avec précipitation. Un instant Ecaterina a le réflexe de murmurer une prière pour la mère et l'enfant mais se mordit la lèvre en se ravisant. Ce fut au tour d'un homme de partir en enfourchant un cheval. Le reste de l'assistance admirait en louant le Saigneur.

Du feu... Des nuances crépusculaires sur le fond indigo d'une nuit d'été. Elle imaginait là les membre du Petit Peuple danser en rond autour de l'église, avec à leur tête la Reine et le Roi. Pourquoi pas le Fou parmi eux, comptant fleurette à une Lavandière. Après tout, tout ce cirque pour les fantômes d'âmes que l'on rejette égoïstement.

A cette pensée, un sourire s'inscrivit doucement sur les lèvres satinées de la jeune fille. Un sourire si lent à s'étendre et si discret qu'il semblait illusoire, sorti des brumes. Ses grands yeux absinthe admiraient les flammes et les étincelles bercées par les chants liturgiques.

Enfin l'homme sortit de l'église en déclarant avec assurance que les fantômes avaient été renvoyés.

*J'espère que non...* songea-t-elle d'une voix qui dans son esprit était aussi faible.

D'une façon ou d'une autre, tout le monde ment. Que les exorcistes aient échoué ou que tout cela soit une ingénieuse mise en scène, il y avait forcément un mensonge derrière tant d'assurance. Dès lors se trouvait une bonne raison de croire que les fantômes devaient bien se gausser dans la nuit de la naïveté humaine.

Mais parce que mentir est un moyen commun d'assurer sa survie, le sourire brumeux de la sorcière valaque flotta sur ses lèvres. Elle avait envie d'applaudir son culot afin de faire comprendre aux imbéciles qu'ils étaient piégés. Sauf qu'elle se retint. Il serait anti-pédagogique d'ouvrir leurs yeux aux crédules. S'ils n'en sont pas capables, tant pis pour eux, et tant mieux pour le menteur.

Ses yeux pâles fixaient l'exorciste drapé d'audace.
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La Saint-Jean (#7)

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