Ah ! L’officieuse…
Des boucles rousses et blondes sur la soie de l’oreiller flamboyèrent aux pâles lueurs de la cheminée. Des morceaux de porcelaines éparpillées sur le sol. Une liqueur jaunâtre tomba en gouttes sur des planches de parquet gonflé. Calixte retroussa ses manches et posa ses mains sur les tempes de l’endormie, tandis qu’une femme au ventre affaissé copiait ses gestes pour l’homme. Pour la famille Delucy, Forbachois depuis l’aube des temps, la chaleur sèche de Rodez égrenait petit à petit leurs pouvoirs et leur patience. Le premier abandon fut un fiasco, hors de question de louper ce coup. Cette fois, ils avaient pensé à tous les détails :la ressemblance, le passé magique et des parents perméables aux envoutements. Plus jamais une petite sœur chez un tortionnaire comme l’Aubergiste de la Croix-Rousse.
À défaut de dons aussi dangereux que puissant des Valdemar, la nouvelle comtesse avait rêvé d’une vie normale, ce qui l’a poussa à quitter le Clan quelques décennies plus tôt. Le prix à payer fut conséquent : une amnésie et deux stérilisations. On ne pouvait pas se permettre pour la survie des sorciers qu’un rejeton cherche ses origines ou qu’il propage dans le monde leur sang sacré. Olrun, leur déesse, était un don pas une graine à semer. Maintenant, il commençait à ressentir son rêve d’enfant, un être se développer, donner des coups, se réveiller en reconnaissant certaines voix, au point de se poser la question sur son sexe ou sa personnalité, lui chercher un nom et lutter contre son partenaire, perdre les eaux, être déchiré puis le tenir pour la première fois, le trouver moche et beau en même temps, l’imaginer grand…
- La mémé n’a pas un esprit fermé. Qu’est-ce que tu fiches ? La vinasse va pas durer des plombes.
Calixte était incapable de répondre, rattrapé par cette pensée qu’il ne pourrait jamais donner la vie, sentir ce lien fort avec son enfant, bon sang, il comprenait à cet instant qu’il lui manquait un truc. Un énorme truc, il n’avait pas de cœur, voilà le souci.
- La ferme, Elle m’attaque, étouffa-t-il en serrant ses mâchoires.
Calixte se concentra davantage sur sa peine pour rattacher le rêve à la réalité, plus empathique encore, quitte à souffrir davantage. Créer un lien maternel n’était pas simple, pourquoi sa mère lui donna à travailler sur une femme. Il soupira et se concentra sur ses propres souvenirs en particulier, à ses sentiments protecteurs quand il vit pour la première fois le sourire charmeur de sa nouvelle petite sœur quelques heures plus tôt. En réponse, un manque plus grand se creusa, un sentiment de culpabilité, mais qu’est-ce qu’il était en train de faire. Il pouvait l’élever, bientôt il s’occuperait tout seul de la ciergerie. Oui, mais à ce stade, la jeune comtesse vivrait plus intensément son manque d’enfant.
- J’ai posé la gosse dans l’berceau. Laisse-la, l’nobles ont que des nourrices. Ne vont pas la rejeter, ils ont trop besoin d’elle.
- La ferme, cracha-t-il en sueur. Je t’ai…
Une seconde d’inattention a suffi pour l’esprit de Cassandra de Saint-Loup pour retourner le sort contre lui. Il hurla en sentant ses tripes s’arracher en pensant qu’il ne reverrait jamais sa sœur, ne l’élèverait jamais, ni ne terroriserait ses futurs prétendants. Sa mère le prit par les épaules et le jeta sur le sol pour rompre le lien, puis d’un doigt accusateur.
- Les Valdemar ne sont pas comme les autres. Comme nous. Dommage que leur famille va s’éteindre, on aurait bien besoin d’eux à l’avenir. Je ne donne pas cher de Viviane, elle va vivre pas longtemps, trop triste. T’as pas intérêt de l’aider quand t’y r’vint de Forbach.
Il se releva péniblement, se promettant qu’un jour, il changera les règles de son Clan et qu’il pourra recomposer sa famille. Il quitta la chambre en refusant de revoir la petite Narcissa de peur de l’enlever et rejoignit les autres, au point de rendez-vous.
Une fusée brulait le ciel avant d’exploser en milliers d’étoiles scintillantes, au-dessus des nez levés et bouches ouvertes des paysans. Puis on entendit des coups de canon, à moins que ce fût avant ou il y a trois jours. En vérité, personne en ce petit matin du 20 octobre 1630 n’était capable de retracer les événements de la semaine, alors ceux, dont la gueule de bois n’attaquait pas trop ,discutèrent pour savoir. Ils en conclurent par une des plus grandes fêtes du siècle puisque, tout le monde réussi à être torché même le cureton ! Et rien que ça, cela ne méritait pas un pamphlet sur l’alcool.

Calixte Delucy : Sage d’Olrun, tient la Ciergerie en bas de chez elle, grand frère. Narcissa a encore des difficultés à y croire, tout est si idyllique : leur rencontre, conversation, complicité ; au moment où elle avait besoin d’une famille. Il devine ses pensées, rêves, peurs… C’est si… étrange.
Apoline Delucy : Apprentie Prêtresse du Lys Noir, bonne à tout faire, grande sœur. Grande sœur ou non, il faut absolument la sortir de ce trou à rats et lui donner une vie honorable. Le souci est qu’elle n’a jamais réussi à lui parler, son aura est si particulière que son courage part en courant.
Danielle Byche : Initiée d’Olrun, bergère, grande sœur de cœur et gardienne. Bien qu’elle n’apprécie pas sa famille (et compte bien le cacher), elle est sa protectrice et sa confidente. Manque plus qu’à lui trouver un fiancé, si seulement elle n’était pas si sauvage avec les hommes !

Ah ! L’officielle…
Née la nuit du 17 octobre 1630, dans la chambre des futurs comtes de Saint-Loup à Rodez. Elle vit une enfance paisible et heureuse, loin des nourrices et des rumeurs populaires. Son inclination pour les activités dites masculines et une grande détermination lui permit d’avoir une éducation digne d’un Prince, dont une majeure partie vient de son père, le Comte Amaël de Saint-Loup. Les étés furent consacrés à accueillir dignement le fils d’une amie de sa mère, David Geisler.
La peste entra sur ses terres en 1641 pour emporter la moitié de ses gens, dont son père, et instaurer des années pénibles. Étant née femme, son oncle Nicolas prit le titre quelques semaines plus tard, ce qu’il lui donna assez de hargne pour combattre sa récente impopularité, car : « le cœur guide le peuple aussi surement que leurs ventres ». Avec les ecclésiastes, elle créa des œuvres de charité, donna des cours pour apprendre à lire et à écrire afin de garantir le maintien des biens dans les familles et lutta contre certains notaires et nobles quand ce fut juste, quand on lui fit demande. Trois ans plus tard, on la surnomma « La Bonne Dame de Rodez ».
Les années 1644 à 1646 furent celles de grands changements. Échanger son soleil pour les brumes forbachoises, quitter ses amis pour des visages mornes, et faire ses adieux à ses gens avenants contre des inconnus scrutant les rues derrière leurs fenêtres. Tout commença, par une lettre de Sébastien Garin demandant aide à sa mère pour contenir la nouvelle génération d’Inquisiteurs, et l’agression de l’Agent du Diable se soldant par sa défenestration, donnant des ailes à son ancien ami d’enfance à reprendre contact, en vue de lui offrir des leçons d’escrime. Au fur et à mesure que ses sentiments pour David gagnèrent en profondeur, Narcissa reprit son quotidien, tout en cherchant une solution à un pressentiment de mort de plus en plus puissant, au point de durcir dans ses appartements la sécurité. Des mailles pas assez fines, pour la petite fille de son intendant qui fut retrouvée, quelques jours plus tard, morte avec le restant de sa famille dans une maison abandonnée. Le jour même, David transporta le corps et l’esprit mutilé de Narcissa à Cassandra de Saint-Loup. Les rumeurs de cette époque vantèrent l’héroïsme de l’Inquisiteur pour ses soins miraculeux.
L’Été 1645 signa la fin de ses aventures en tant qu’héritière des de Saint-Loup : son cousin et nouveau Comte de Rodez Théophile de Saint-Loup ayant renié mère et fille dans un face à face politique violent. Pour sauver les apparences, Cassandra et Narcissa revinrent à Forbach pour habiter un hôtel particulier spécialement aménagé. Sa tante Viviane vint les rejoindre. Le Clan Valdemar est né. Narcissa ne quitta le bâtiment que pour les événements importants et les messes. Sa dernière visite vint la nuit du 24 décembre 1645 lors de la Messe de Minuit, dont on remarqua sa piété (ayant prié avec les Inquisiteurs à leur libération) et un talent pour commander aux différents corps de métiers et bénévoles aux soins des blessés. Elle quitta l’Église qu’en mi-janvier 1646, au départ de tous les patients. Puis on s’étonna de la voir traverser le village la nuit, bravant ses phobies sensorielles pour continuer les soins de certains malades, parfois relayés par un barbier quand la météo brulait le stigmate. Aux yeux des Forbachois, elle est un modèle pieux et une ennemie des sorcières.
L’Eté 1646, elle annonça à son amant David Geisler, sa grossesse.

Comtesse Cassandra de Saint-Loup :i Inquisiteur général, ancienne Mère supérieure de l’Ordre des Carmélites, veuve d’Amaël de Saint-Loup, mère de Narcissa. Les épreuves les ont rendus et les rendront plus soudées, bien que le temps commence à les rattraper à sa plus grande tristesse.
Viviane Valdemar : Prêtresse d’Olrun, gérante d’un commerce de tissus, tante et aguerrie de Narcissa. Chacune respecte l’intimité, apprend, aime l’autre malgré les différences. Sa petite fée est son modèle sorcier (l’autre étant son défunt père) et toutes deux sont inséparables.
David Geisler : Sergent, père en devenir. Une relation qui fut difficile à accepter et à faire accepter. Pourtant tout porte à croire que ce couple est fait pour durer au vu des nombreuses tempêtes traversées. Sans David, il n’y aurait jamais eu de Narcissa.

Citation :

« L'année des onze ans de Narcissa, Amaël décède, des suites d'une maladie qui le terrasse en quelques jours à peine. »
« Et enfin, deux ans après le décès d'Amaël, il y a cette lettre de Sarah Geisler. »

Citation :

« L’année de ses onze ans, la peste emporta les âmes de la moitié de la ville, son père, au bout de quelques jours de combat. »
« A treize ans, ressentant l’inaction néfaste pour sa mère, sa fille accepta à contrecœur de vivre à Forbach malgré des jours entiers de négociation par le nouveau Comte pour lui faire changer d’avis.»

Narcissa de Saint-Loup a écrit:

par l’équipe administrative (car même si elle ne dit rien, elle lit tout. S’il n’y a pas eu une demande de corrections, c’est que la donnée est validée).

Europe a écrit:

rends-toi Cassos tu es cernée!!