Amanda, de son nom complet Amelia Rosa Cornelia d’Este, naquit à Rome, plongée dès ses premiers jours sur notre terre dans la religion. Sa mère mourut en couche et elle fut donc confiée à une nourrice française. Madeleine. Une servante dont on ne connaissait que le prénom. Après à peine quelques années passées en Italie sa famille émigra vers la France, suivant son père déjà Inquisiteur avant sa naissance. Il la plaça rapidement en couvent lui laissant sa nourrice comme dame de compagnie même lorsqu’elle n’eut plus eu besoin de son lait. Madeleine, n’ayant pas d’autre enfant vers qui tourner son affection, le sien étant un mort-né, elle aima Amy comme sa fille et même davantage…
La jeune fille passa son enfance et son adolescence dans le même model. Privée de tout contact social excepté celui des sœurs et de Madeleine. Elle n’a jamais jouée avec d’autres enfants, ne s’est jamais fait courtisée dans sa préadolescence par quelque jeune garçon trop ambitieux. Son seul contact avec la gente masculine étaient les visites de son père amenant parfois un autre homme pour lui présenter sa ‘’mignonne piccola ragazza ‘’. Ces visites en duo se faisaient de plus en plus fréquentes alors qu’elle avançait en âge. Elle commença donc à développer une crainte certaine envers l’homme qu’elle considérait avant comme tout-puissant. Elle se mit à voir derrière l’amour de petite fille qu’elle portait à son père, elle découvrit quel individu cruel et malsain il était. Arrêtons-nous donc sur un évènement des plus récents, celui qui l’a finalement amené à fuir sa vie…

Elle avait enfilée sa plus jolie et Madeleine finissait de coiffer ses douces boucles parfumées à la rose. Son père venait le voir le soir même et il exigeait à chaque fois qu’elle soit bien toilettée. Elle redoutait la visite et souhaitait de tout son cœur que le temps s’arrête pour qu’elle ne puisse plus jamais le voir mais le soleil faisait toujours son chemin journalier autant de cœur mettions-nous à vouloir le stopper. Une douce voix où on percevait une trace indélébile d’un accent venu des champs retentit derrière elle.

- Tu deviens de plus en plus belle mon enfant…Promets-moi de faire attention à ton père et son ami tout à l’heure.

Elle se retourna vers la femme derrière elle. Madeleine n’était plus vraiment jeune et la dure vie qu’elle avait menée avait épuisé ses traits mais jamais Amanda ne pourrait considérer le seul visage maternel qu’elle n’ait jamais eu comme autre chose que magnifique.

- Aussi dur soit-il il s’agit tout de même de mon père. Aucun simple regard ne saurait atteindre à ma pudeur. Il ne laisserait pas les choses aller plus loin. Mais si cela peut t’aider à ne pas trop t’en faire pour moi je te promets que je ferais attention.

Elle sentit l’effleurement de lèvres sur le dessus de son crâne.

- Tu es une bonne fille Amy. Ne laisse jamais personne se mettre en travers de ta volonté.

A vrai dire il était trop tard pour ce dernier détail. On avait contrecarré ses idées toute sa vie. Mais elle ne voulait pas chagriner sa nourrice bien-aimée. On entendit du bruit et des rires gras en bas. La jeune fille se leva de sa chaise. Celle en pin blanc assortie à sa coiffeuse. Elle étreignit Madeleine cherchant un dernier réconfort dans ses bras avant de se retrouver face aux deux hommes ou plus qui attendait en bas. Celle-ci lui dit une dernière parole, sa voix sonnant presque caverneuse lorsqu’on avait l’oreille appuyée contre son cœur, la nourrice étant une grande femme elle la dépassait d’une tête.

- Je ne serais pas loin ma petite. Maintenant il te faut y aller.

Amanda prit son courage à deux mains et ouvrit la porte se faufilant discrètement dans l’escalier effleurant les marches sans un bruit.

- Ma fille ! Où est ma fille ?

Il l’aperçut alors qu’elle pénétrait dans la pièce et se retourna vers l’homme qui l’accompagnait. Elle voyait qu’il avait les cheveux poivre et sel et des lèvres pleines mais le reste de son visage était masqué par l’un de ces masques de médecins qui lui donnait l’allure d’une pie. Chose mise en valeur par sa grande taille et une minceur extrême. Il était effrayant.

- Ma che bella ragazza ! Je t’avais dit qu’elle te plairait mon ami.

L’Autre hocha vivement la tête riant sous son masque. Les deux hommes étaient apparemment saouls. Son père se dirigea vers elle et l’agrippa par le bras la tirant vers le centre de la pièce. Elle ne put retenir un gémissement de douleur sous la force de sa poigne.

- Va donc le saluer comme il se doit Amanda !

Elle secoua vivement la tête essayant de se dégager. Mais l’Autre arriva et saisi son menton entre ses doigts l’examinant la tête légèrement penchée de côté le long bec de son masque lui touchant presque le visage. Son haleine fortement alcoolisée la faisait quasiment suffoquer.

- Père je vous en supplie…

La prise sur son bras cessa mais elle n’osait pas bouger face à l’Autre dont un sourire sadique étirait les lèvres.

- Qu’y a-t-il ma fille ? Mon ami ne te plaît pas ? Tu n’as pas là une attitude digne de ton rang te débattant ainsi. Tu me fais honte. Je te prie de présenter des excuses prestement.

Il la poussa violemment vers l’Autre qui la tint fermement d’une main l’autre venant explorer sa gorge et descendant plus bas. La peur la figeait et le dégoût lui retournait l’estomac. Elle resta ainsi pétrifiée pendant plus d’une minute alors que la main de l’homme continuait à profaner son corps. La voix doucereuse de son père lui parvint à peine.

- Voilà, c’est ainsi que doit se comporter un Dame.

Elle sortit de sa torpeur lorsqu’elle entendit un bruit de déchirure, tout le bas de sa robe avait été séparé du haut au niveau de son nombril. Elle se transforma en une furie hurlante lorsque l’Autre lui arracha son sous-vêtement. Elle ne pouvait pas rester ainsi inactive et soumise. Sa force ayant été décuplée l’espace d’un instant elle réussit à le faire trébucher. L’homme tomba sa tête heurtant le coin d’un meuble en cerisier. Une flaque de sang d’une couleur vive se mit à s’étendre sous lui. Elle resta debout en état de choc, son cerveau n’assimilant pas encore ce qu’il venait de se passer. Une gifle qui failli l’énuquer la ramena à la raison.

- Pauvre idiote ! Je vais te tuer, puis je violerais ton corps avant de te jeter aux loups dans la forêt. Ainsi tu…

Il finit sa phrase dans un gargouillis la pointe d’un long couteau de cuisine ressortant de son cœur. On lui jeta une couverture dessus, elle l’attrapa par reflexe mais c’est un regard absent qu’elle tourna vers Madeleine. Comme si son esprit avait momentanément quitté son corps pour se préserver de l’atrocité de la situation. La vieille femme était en pleurs mais gardait courage.

- Fuis ma petite ! Prends le cheval de ton père et galope le plus loin possible ne t’arrête pas avant que la bête s’écroule. Ils te condamneront à mort à la minute où ils verront ce massacre. Il faut que tu te caches ! Je retiendrais les sœurs le temps que tu arrives au bout de la propriété.

En effet on entendait des pas précipités dans les couloirs. Les paroles de la nourrice firent lentement chemin dans son esprit.

- Mais toi ! Si tu restes tu mourras !

Madeleine l’entraîna d’une poigne ferme vers la porte de l’entrée et la poussa dehors sans ménagement.

- Je ne ferais que te freiner. Et si tu restes nous mourrons toutes les deux. Sauves-toi mon enfant et vis la vie dont tu as toujours rêvée. Je t’aime Amy. Dans mon cœur tu es ma fille.

Amanda s’enveloppa de la couverture et grimpa sur l’étalon de son père qui attendait le retour de son maître, attaché à une barrière en bois.

- Tu as toujours été ma seule mère…

Et elle partit…le cœur en mille morceaux. Elle voyagea plusieurs jours à travers la France, évitant les sentiers et les routes, buvant aux fleuves, ne s’alimentant pas. Elle échoua épuisée et affamée aux portes de Forbach vêtu e pour tout vêtement que le haut de sa robe et la couverture rêche qui couvrait son intimité. Menant par la bride un étalon bai fiévreux et quasiment mort d’épuisement.